Chrys a écrit :JYB a écrit :Entre autres indices à l'appui de ce que je prétends, la longue scène sous l'orage où Chihuahua Pearl se déshabille dans une grotte et se retrouve à poil en présence de Blueberry : belles images, d'accord, mais à mon sens jamais votre père n'aurait écrit ce genre de scènes : c'est long, ça fait remplissage, ça n'apporte pas grand chose au scénario, c'est en outre un peu osé... Tout cela est très inhabituel, et même unique, dans la production de votre père.
Pour ma part je trouve cette évolution très possible. En effet, dans une BD comme "Le Privé" par exemple, tout est beaucoup plus osé que dans le reste de la production de JMC, on a vraiment à faire à une BD adulte.
Je vois vraiment une évolution au fur et à mesure des années sur les thèmes abordés par JMC. Ex : j'ai été très surpris de voir Tanguy tomber amoureux dans "Mission Spéciale", quelque chose qui ne serait jamais arrivé à Buck (alors qu'on suppose que si les épisodes de la guerre du Pacifique avait été écrits à une autre époque, il y aurait eu un flirt entre Buck et Suzanne).
Vous avez en partie raison, mais je maintiens quand même ce que j'ai écrit précédemment sur le net changement de ton et d'esprit dans le scénario des 22 premièes planches de Arizona Love, série Blueberry - puisque c'est de là que la discussion est partie. Cela dit, Philou ayant donné son point de vue en connaissance de cause, il a certainement raison ; je ne veux pas ouvrir une polémique à ce sujet, et on va dire que je me suis trompé quand j'ai prétendu que JMC n'avait pas écrit la totalité de ces 22 pages...
Juste deux choses en réponse à votre propre message :
- où avez-vous vu que "tout est beaucoup plus osé" dans Le Privé que dans le reste de la production de JMC ? Un tout petit peu plus, et encore, sur un ou deux faits, soit, mais "tout" et "beaucoup plus", sans doute non. En tout cas je reconnais bien Charlier dans ce scénario et rien ne m'a véritablement choqué, si je devais employer un mot fort. Des avis multiples venant de tierces personnes pourraient nous départager, hélas l'histoire n'est pas très connue et n'existe pas en album en français, et je crains que l'ensemble de ceux qui nous lisent ne puissent pas juger sur pièces ; de toute façon, attention, cette histoire, vous le savez peut-être, est un cas vraiment à part dans la bibliographie de JMC.
- Mission spéciale date (pour ce qui est de la première parution, dans Pilote) de la fin 1966 ; c'est l'époque où JMC écrivait les premiers scénarios des épisodes télé des Chevaliers du ciel, où, là, l'élément féminin était important, avec un Laverdure dragueur impénitent, et Tanguy effectivement amoureux (de la secrétaire du colonel). Ce n'est pas tellement l'évolution de la société qui a fait changer JMC (mai 68, ce ne sera qu'un an et demi après), mais plutôt une sorte d'adéquation entre les épisodes télé et la BD ; or à la télé, pour toucher un plus large public, et parce que c'est comme ça, c'était mieux de montrer les héros vivant des aventures amoureuses. Mais avouez quand même que ces "aventures" étaient du genre soft ; voyez aussi (au hasard parmi les séries télé françaises dans le genre à l'époque) "Les Globe-trotters", avec les acteurs Yves Rénier et Edward Meeks où la drague était omniprésente, mais soft et sympa.
Pour en revenir aux séries de JMC d'une façon générale, je dirais qu'il y a effectivement évolution, mais par petites touches, au fil des années voire des décennies, mais que le scénariste est quand même resté fidèle à un certain nombre de précepts qui n'ont pas changé, et que de toute façon, au niveau des moeurs, JMC est resté, dans ses BD comme dans ses autres écrits, et jusqu'à sa disparition, d'une grande pudeur. Il s'en en expliqué d'ailleurs dans des interviewes, et il le disait à son entourage (cf ce qu'en dit Guy Vidal, ami de la famille, décédé aujourd'hui, dans l'ouvrage sur JMC "Un réacteur sous la plume"). Vous, vous semblez parler d'une évolution dans le choix des thèmes ; mais c'est normal : pour écrire de nouveaux scénarios, on utilise (on = Charlier, moi, tout autre scénariste traitant de sujets contemporains en prise avec l'actualité) le matériau existant, les sujets qui défrayent la chronique (le problème des sectes et de l'embrigadement de leurs adeptes, dans le cas du "Privé") ; peut-on vraiment appeler ça une "évolution" dans le choix de ses sujets ? C'est plutôt une utilisation de sujets forts et porteurs, en fonction de l'actualité au moment où on cherche un thème à une prochaine histoire.
Quand je disais, quelques posts plus haut, que, en dehors de Blueberry, JMC n'avait pas évolué sur le plan des personnages et de l'esprit de ses séries, je le maintiens et je ne parlais pas que du côté des moeurs et de la vie amoureuse de ses héros ; je parlais aussi et surtout, d'une façon générale et sans tenir compte de quelques points ponctuels, dans sa façon de travailler d'une part, et sa façon de présenter les choses dans ses scénarios d'autre part. Je veux dire par là, en résumé : "ça reste bien du Charlier".